Annihilation: Meh ?

              Il est de ces films où vraiment on se demande ce qu’ils sont, ce qu’ils ont voulu dire. Sont-ils visionnaires au moins de nous avoir fait perdre le sens de leur signification ? Où sont-ils juste tellement mal écrits que leur signification se dissout au fur et à mesure du visionnage ?

              Annihilation, a été réalisé par Alex Garland, qui a notamment été le scénariste de nombre de bon film de science-fiction, tel que 28 jours plus tard ou encore Solaris, tous deux réalisés par le grand Danny Boyle. Ce n’est que récemment qu’Alex Garland s’est donné à la réalisation, avec Ex Machina, sorti en 2014. Annihilation est un nouveau genre de film. Ce genre qui précisément sortira partout en même temps et sur tous les supports. Il s’agit, à ma connaissance du deuxième film de ce genre avec The Cloverfield Paradox, qui fut diffusé immédiatement après le Superbowl aux USA et donc après son annonce pendant la mi-temps. Mais finalement ces détails sont peu importants. Que vaut le film ?

En résumé, il s’agit de l’histoire de Léna, ancienne militaire mais aussi spécialiste en génomique humaine et notamment en oncologie (l’étude des cancers). Oui, aux Etats-Unis, on peut être une spécialiste importante dans un domaine scientifique et tirer sur des afghans, ce n’est pas antinomique.

Léna est la femme de Kane, un militaire, qui a disparu depuis un an. Voilà pour la mise en place de l’intrigue. Tout va donc partir de cette disparition du mari de Léna. A la suite du retour je dois dire assez inattendu de son mari au beau milieu de la chambre conjugale, Léna va finir par découvrir l’objectif de la dernière mission de son mari.

3 ans auparavant, quelque chose est arrivée dans un parc national aux Etats-Unis. Un miroitement, ou un linceul coloré est en train de progresser à partir d’un phare au beau milieu du parc. Mais là où le bât blesse, c’est que quiconque y est entré n’est jamais revenu. Personne ? Non, évidemment le seul survivant connu est le mari de Léna, qui depuis son retour est désormais gravement malade souffrant de nombre d’insuffisances organiques. Donc, l’objet de l’intrigue sera une nouvelle expédition au travers du miroitement (malgré la mort de genre 20 personnes), cette fois ci avec l’héroïne du film, Léna alias Natalie Portman.

 

Globalement, le film n’est pas mauvais. Mais il donne vraiment l’impression de se perdre dans ses pistes de réflexions. C’est même à se demander si le réalisateur a trouvé la solution de sa propre création. Si bien qu’en tant qu’œuvre, le film ne se suffit pas à lui-même et c’est là le principal problème d’Annihilation. L’œuvre semble orpheline de son interprétation et le spectateur, avide d’un double sens caché se ronge le cerveau de manière à y voir des interprétations qui ont toutes les chances d’être erronées. Résultat ? Le film frustre le spectateur, qui finalement n’a que peu de pistes pour satisfaire sa curiosité et son imagination.

Personnellement, j’ai été particulièrement marqué visuellement par le fait que tout semble être filmé au travers d’une surface translucide. La réalité n’est accessible qu’au travers d’un prisme. Le verre d’eau entre Léna et Kane. La vitre de l’ambulance. La visière des scientifiques. Les écrans des caméras. Le miroitement lui-même. J’en ai donc tiré une interprétation que je sais probablement fausse mais je l’ai vu comme une métaphore des écrans, qui sont un prisme entre la réalité et nos yeux.

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              Même dans les flashs back, très courts mais finalement assez nombreux, il semble que la caméra a sur son objectif un filtre de couleur, dérobant la réalité des du vrai monde à nos yeux. Les aberrations chromatiques sont d’ailleurs un peu partout, un peu à la façon de JJ Abrams et renforce encore cette idée que la réalité devant nos yeux n’est pas la bonne et qu’entre elle et nous, il y a comme une plaque de plexiglas qui crée des reflets sur le capteur de la caméra

              Cette altération systématique de la réalité par des prismes déformants donne finalement des chimères. Des créatures irréelles, mélange de plusieurs animaux, comme nées de l’imagination d’un créateur de mod dans un jeu vidéo. Cela vaut pour les êtres humains, qui se transforment à mesure qu’ils restent dans cette réalité onirique. Cela rend fou certains personnages, les rends associables, ruine leur combativité et les rends vulnérables aux chimères qui sont finalement le fruit de leur imagination et de l’addiction à ces prismes déformants. Par ailleurs, la créature qui rugit le dernier son de ses victimes est assez flippante, c’est plutôt bien joué.

              Finalement, le point de non-retour, vient avec un dédoublement complet de Léna, quand enfin elle atteint le phare, qui pourrait représenter certes la connaissance mais aussi cette lumière qui illumine de l’intérieur le prisme du miroitement et rend toutes choses irréelles. Pour moi ce dédoublement représente la réalité alternative que nous nous construisons dans nos addictions à nos écrans et à nos prismes déformants, qui nous déforment jusqu’à nous renvoyer une image de nous étrange et anormales. La seule solution est alors d’accepter cette double identité, ou de la détruire, chose qui sera finalement faite par Léna, qui détruit son double à la source du miroitement.

              La scène finale montre Léna en compagnie de Kane, apparemment redevenu normal mais toujours apathique. Se serrant dans les bras l’un de l’autre, Léna remet en question l’identité de son mari. Est-ce lui ou est-ce un autre que celui qu’elle a connu, ou un savant mélange des deux. La réalité effrayante de l’aliénation mentale due aux écrans se fait jour et le miroitement revient, mais directement dans les yeux des deux protagonistes, comme pour encore une fois échapper à la réalité âpre de la vie. Pour retourner dans le monde imaginaire d’Alice, dans ce pays fantasmé, où la réalité peut-être plus dure mais où finalement elle est ce que nous voulons ou redoutons.

              Encore une fois ce n’est que mon interprétation. Cependant elle me plait bien et c’est là le principal. Il est toutefois très dommageable que cette interprétation soit si fragile et si soumise à ma seule sensibilité.

              Mention spéciale à l’univers sonore, très simple parfois, quelques morceaux minimalistes de guitare à la façon de The Last of us. Mais aussi des bruits électroniques particulièrement bien trouvé qui nus plongent dans une ambiance tout aussi fantasmée et irréelle que les images que nous avons à l’écran. Mais finalement… Meh ?

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